La joie du shabbat

LA JOIE DU SHABBAT

 

 

 

                                                                                                                          A Rémi

 

 

       A la synagogue, le vendredi soir, certains chants sont plus connus que d’autres, comme le Mizvor ledavid ou le Tsadik katamar, s’ils sont chantés avec une mélodie qui les met en valeur. Tout dépend des cultes – l’algérien, le portugais… Le Lekha Dodi est un des premiers chants du jour de repos, il dit : « Viens ma fiancée au-devant du shabbat ; il est là ; il t’attend » ; il en existe plusieurs mélodies. Le mieux est de le chanter d’une façon entrainante. Quand vient le Chema Israël, tout le monde touche son front et ferme les yeux pendant quelques secondes. La Amida se lit silencieusement. C’est une bénédiction. On recule de trois pas, on fait des courbettes. La petite danse des dos, est une des distractions de ces moments-là.

Le kaddish, soit la prière pour les morts, qui est rythmée de façon étonnante par des mots se ressemblant, est très souvent repris pendant l’office, et interprété par des rangées de volontaires debout. Ainsi même la mort est un rythme. C’est peut-être une façon de s’en guérir.

A la fin de l’office, nous entonnons un chant jovial, dont chaque vers finit en -o, kédouchato, lerechito, vetif-arto. Il emplit le cœur d’allégresse. Il semble qu’avec les chants, le cœur soit un verre qui se remplit de boisson.

Emplir la vue. La synagogue est une vue, une peinture. Le ciel y est peint. L’arche sainte y est figurée. On peut y embrasser le mur où dorment les rouleaux. Les lustres y sont éclatants, les murs comme du beurre, tout est doré, luxuriant, riche et d’un grand éclat. Il y flotte des parfums.

J’ai participé à cet office des dizaines de fois mais il y a quelques semaines, la lumière du shabbat s’est révélée à moi. « C’est une très grande lumière jaune pleine de lustres et de velours, portée par des chants enfantins et somptueux. Elle éclate comme un soleil et crée en mon cœur une pleine aura de bonheur et l’envie de chanter et de rire à mon tour », ai-je écrit à un de mes correspondants. Tout m’a alors fait aimer le monde et voir en la création une merveille. C’est un sentiment réjouissant, étrangement proche de la « joie active » décrite par le philosophe Robert Misrahi[1]. La spiritualité juive est dans le bonheur.

 

 

 

 

 


[1] « La joie active est celle qui provient d’une activité ou d’une action de création, en même temps que de réflexion. » Robert Misrahi, Plaidoyer pour un autre bonheur, le Bord de l’Eau, 2018, p.94.

Date de dernière mise à jour : 19/09/2019

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