DE QUOI EST FAIT L’HOMME ?
Il est fait de la terre sur laquelle il vit : l’homme est dans son élément.
Le Coran donne plusieurs précisions, mais la plus simple est : « Je vais créer un être humain à partir du limon » (sourate 38 : 71) ou, autre traduction : « J’ai formé l’homme de boue »[1]; la propriété de cette terre est d’être très fertile.
La matière est l’être, ou décrit l’être. Si tous les hommes sont faits de terre, le choix d’un terme plutôt que d’un autre, montre l’importance donnée à l’être humain dans les sociétés où sa création a été décrite : quel but se propose l’homme ? Quelles sont ses priorités ? Que peut-il ? Dans la civilisation mésopotamienne et musulmane, l’être humain est fait de « boue », donc de terre fertile, il a pour vocation de se multiplier.
Dans les Métamorphoses d’Ovide, poète latin, il est question de semence divine ou d’« argile »[2] ; on songe à une civilisation dans laquelle bâtir et élaborer sont des actes de grandeur naturelle.
Dans la Genèse de l’Ancien Testament, l’homme est un « glébeux ». Ce semble le mot littéral[3]. La glèbe est un sol, ou un champ, déjà cultivé ; les Hébreux étaient des cultivateurs, très tôt.
« Plus les femmes ont de diplômes, moins elles font d’enfants ». Du fertile ou du cultivé, lequel des deux hommes est le mieux traité ? Cela dépend, encore, des sociétés.
Le Coran dit que l’homme est fait de boue ou de limon. Il s’agit de l’homme, donc de tout homme, donc de tous les hommes. Il n’y a pas de différence ontologique entre un homme et un autre ; ceci est la même matière d’origine. C’est Iblis (Satan) qui invente la discrimination : « Je vaux mieux que lui. Tu m’as créé de feu, et lui, tu l’as créé de limon. » (7 : 11) Que les hommes ne soient pas créés de la même matière, c’est ce qui induirait qu’ils soient inégaux ; or Dieu dit non. C’est la méchanceté qui introduit la division, et c’est extrêmement grave.
Me vient à l’esprit la sagesse de nombreux croyants qui vous parlent de leur religion avec cette idée simple, d’égalité ou de bonté fondamentales, démolie par des « extrémistes » qui ne sont pas les « vrais » musulmans, de sorte qu’on les pense naïfs.
La Tunisie vient d’adopter une loi sanctionnant le racisme, c’est parait-t-il la première fois dans le monde arabe ; vue la précision du Coran dans ce domaine – l’espèce humaine est une et il n’y a pas d’inégalité de naissance – on peut s’étonner que cela soit venu aussi tard.
Le Coran présente la personnalité de Noé avec humour. Lui est un intellectuel : « Tu as déjà discuté avec nous et tu ne fais qu’augmenter nos disputes. », lui reprochent ses contemporains (11 : 34). Trait de caractère confirmé : « chaque fois que les chefs de son peuple passaient auprès de lui, ils se moquaient de lui. » Noé passe pour un suppliant extravagant ; il a la réplique exigeante ; il se montre malhabile socialement, puis très sûr de lui. C’est, cependant, cet homme qui a sauvé l’humanité ; il n’y a donc pas eu d’interdiction coranique à être un intellectuel.
Ces écrits, pour moi surprenants, sont tirés des manuels scolaires de sixième[4] ; avec une présentation d’extraits clairs et illustrés, ils rendent moins artificielle l’étude des relations entre droits de l’homme et textes religieux.
[1] GF Flammarion, trad. Kasimirski, 1970.
[2] Livre I, trad. de Désiré Nisard.
[3] La Bible traduite et présentée par André Chouraqui, Desclée de Brouwer, 1989, se veut une traduction littérale de la Torah.
[4] Lelivrescolaire.fr, Français, 6ème, programme 2016.