Gilles Sacksick, artisan de la lumière

GILLES SACKSICK, ARTISAN DE LA LUMIERE

 

 

 

 

       Gilles Sacksick est un peintre qui, depuis sa naissance en 1942, n’a jamais quitté Paris. Il expose dans un caveau du onzième arrondissement, chaque hiver. A tous les vernissages, il se tient présent, disponible, et me reçoit.

Une deuxième pièce au fond expose les nombreux catalogues et les cartes postales de l’artiste. On travaille en famille : le frère de Gilles, qui trouve surprenant que je n’ai pas 4000 euros à débourser pour une toile, dit : « On a fait des catalogues cette année », et encaisse les achats.

Les plus belles toiles se vendent autour de 10 000 euros, et l’artiste se fait mousser en vendant de simples esquisses à 1000 euros ; pour ces œuvres inachevées, marginales, sans éclat, c’est déjà la signature qui compte.

Les objets occupent une place importante chez Gilles Sacksick. Plus que les êtres, qui, eux-mêmes, lorsqu’ils apparaissent, semblent posés, en attente. Des peintures comme des poteries, nacrées, alternant sombres et clairs, distribuant les couleurs avec abondance de nuances, ou par grandes tâches liquides ; des fleurs, des villages, des pichets et bouteilles, des jeunes filles endormies, son chat tigré Pitou, les portraits comme celui de Gérard Fromanger (« Il ne peut pas y avoir plus opposés que nous le sommes, mais c’est mon ami ») : tout dans la peinture de Gilles Sacksick dit le calme, le repos, le silence, la réception du monde.

Pourquoi des esquisses ?

« Ça je l’ai fait en dix minutes, me confie l’artiste. Au bout de dix minutes, je vois si ça va ou pas, si je vais continuer. L’essentiel est déjà dit. »

Il grimace vraiment quand je qualifie sa peinture de « traditionnelle ». Cet enfermement ne lui réussit pas.

C’est du moins une peinture figurative et qui n’invente pas. Elle possède un ton, comme une mélodie d’auteur qui se consumerait à l’infini. Elle est profonde, mystérieuse. 

Gilles Sacksick a une parole incroyable. Il tient naturellement un discours d’une pureté qui est celle des vrais artistes. Ses paroles font plaisir à entendre. Les autres paraissent ordinaires en comparaison. Il reçoit les témoignages d’admiration de trois femmes, toutes plates et semblables, les unes à la suite, les écoute avec silence et patience, répond aux questions, rit avec bonhommie quand je le salue.

Le cru 2019 fut le plus réussi des dernières années.

« Vous trouvez aussi ? Mais c’est bien ce qui me semblait », constate-t-il. La plupart des toiles de son caveau ont émergé dix mois avant le vernissage, dont ses dormeuses, un thème qu’il avait abandonné et qu’il a relancé. Le modèle, une jeune fille, est de sa famille.

Il ne prend pas de modèle pour ses natures mortes ; aussi incroyable que cela paraisse, elles viennent bien de son imaginaire. La lumière qui les habite est sincère. Gilles Sacksick dit qu’il est un artiste sincère. La lumière, qu’il travaille et pétrit dans ses toiles, est à l’intérieur de lui. Il ne la trouve pas dans le ciel, mais dans ses représentations mentales.

« Je dessine depuis l’âge de quatre ans. Je peins depuis Lascaux. Vous me demandez si je m’inspire du dix-septième siècle ; je ne sais pas trop où c’est, je me suis arrêté un instant ».

Lorsqu’il parle de Don Juan, il précise qu’il s’agit de celui de Molière : avec un tel artiste, on ne quitte jamais la qualité. Il semble appartenir à un autre monde, celui de l’artisanat d’un grand âge, du recueillement, de l’intériorité ; chaque trait de peinture dit la beauté tranquille des choses et leur sérénité épanouie.

 

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