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AUTOBIOGRAPHIE DE MES CHATS (partie 2)
AUTOBIOGRAPHIE DE MES CHATS, partie 2
Une autre compagne a marqué ma vie ; je voudrais faire savoir que je ne l’ai pas oubliée.
J’étais devenue adulte, et depuis plusieurs mois, propriétaire d’un petit appartement à Paris. Il me manquait un chat, j’étais encore fada de ces petits animaux : j’allai à la Société Protectrice des Animaux et j’en adoptai un.
La chatte que je pris avait été trouvée seule sur la route ; on ignorait tout de son nom, de son passé, de son origine. Elle était pourtant étonnamment douce.
Elle avait environ cinq ans, était rayée brune sur le haut, et toute blonde quand on la retournait, avec un menton blanc et des yeux verts qui, le soir, devenaient noirs comme deux olives luisantes. Elle était d’un toucher moelleux, pareille à un gâteau, et sentait de bonnes odeurs fruitées et florales. Elle émettait de petits sons brefs, Ha ! et Hin ! pour réclamer sa nourriture, ce qui la dotait d’un charme certain. Cette délicieuse créature était un peu ronde et je l’appelai Plumpy, dodue en anglais. Sa tête était admirable.
Dès qu’elle posa un pied dans mon appartement, elle se mit à ronronner comme si elle émettait une grande lumière blanche. Je la pris dans mes bras : elle me câlina. Elle venait de comprendre qu’elle avait une maison, qu’elle était adoptée. Elle l’a su d’instinct, avec une grande intelligence.
Quant à moi, je commençai à avoir des scrupules : j’avais été seule à l’adopter, et il me sembla être devenue mère célibataire. Ce fait me donna le cafard. Mon psychiatre me permit de relativiser, en me disant que j’avais affaire à un chat ; or j’étais en pleine projection. Ses propos me permirent d’aller mieux.
Plumpy fit partie de ma vie et fut traitée avec adoration. Elle était très câline et affectueuse. Il n’était pas difficile de la faire monter dans une caisse, de la porter dans un train et donc de l’emmener en vacances : elle découvrit la maison de Talant, y mangea des crevettes, y gratta un mur, y monopolisa des chaises et un canapé. Quand nous rentrions à Paris, elle se réadaptait sans peine à la petitesse de mon appartement.
Je ne me souviens pas de ce que je pouvais lui dire. Je n’ai pas de films de cette époque. Il me reste quelques photographies de cette jolie chatte ; mon regard se porte plusieurs fois par jour sur l’une d’elle, collée sur ma cheminée, qui m’attendrit particulièrement : on y voit un petit animal au corps rond, avec un visage tout innocent et comme quémandeur de caresses.
Plumpy m’accompagna dans la vie pendant un an et demi. Un jour, elle fit une crise horrible, tirant la langue et bavant, le ventre énorme secoué de spasmes, s’étendit à terre pour tâcher d’extraire ses excréments. Le vétérinaire lui diagnostiqua une maladie rénale. Je fis mettre la bête sous perfusions pendant deux nuits, puis il fallut se résigner : Plumpy ne mangeait plus guère, ne se lavait plus, ne buvait plus que de l’eau. Son état était au plus bas. Je la fis euthanasier ; elle mourut comme une fleur, en un rien de temps, ma petite puce : elle se coucha sur le flanc, puis ce fut la dose létale, et son cœur ne battit plus. Qu’un mécanisme aussi complexe que la vie puisse être défait par un simple liquide, voilà qui me stupéfia. Je rêvai de retrouver mon chat dans un paradis matériel où elle serait indemne avec ses odeurs de peluche fruitée, son miaulement ruisselant clair, ses petites pattes qu’elle posait sur mes bras en ronronnant quand je la portais… Elle était mon bébé. Voilà douze ans qu’elle est morte ; elle me manque encore ; je l’adore et je l’aimerai pour l’éternité.